Choisir la bonne fréquence d’image : comprendre avant de tourner
Choisir la bonne fréquence d’image : comprendre avant de tourner
Tourner à 100 images par seconde peut sembler tentant, mais ce n’est pas toujours judicieux. Chaque cadence a un rôle précis, et la maîtriser permet d’obtenir une image cohérente, fluide et adaptée à l’intention de tournage.
Comprendre les fréquences d’images, c’est éviter les pièges du “tout au ralenti” et retrouver du sens dans le mouvement filmé.

24 i/s : le rythme universel du cinéma
Le 24 images/seconde reste la base historique du cinéma.
C’est la cadence qui reproduit le mieux la perception humaine du mouvement dans un récit : un léger flou, une respiration naturelle, une imperfection qui rappelle la vie réelle.
Cette fréquence est idéale pour les scènes narratives, les dialogues, les moments d’émotion. Elle permet de conserver une authenticité que les cadences supérieures effacent souvent.
C’est aussi à 24 i/s que la plupart des caméras offrent le meilleur rendu colorimétrique et la meilleure dynamique.
Pourquoi on est passé au 25 i/s en Europe
Le 25 images/seconde s’est imposé dans les pays utilisant la norme PAL, à cause du courant électrique à 50 Hz.
Cette correspondance entre fréquence vidéo et fréquence électrique évite les scintillements (flickering) causés par les lampes, les écrans ou les néons.
Aux États-Unis et au Canada, la norme NTSC (60 Hz) a conduit au 30 i/s ; en Europe, le 25 i/s est devenu la référence télévisuelle et professionnelle.
Aujourd’hui encore, cette cadence reste essentielle pour tourner sans artefacts de lumière et garantir une compatibilité fluide avec le matériel local.
25 i/s : la référence européenne
Le 25 i/s est la version PAL du 24 i/s cinéma.
Elle offre une image un peu plus fluide sans trahir la perception naturelle du mouvement.
C’est la cadence standard pour les interviews, les reportages, les films institutionnels ou tout contenu diffusé à la télévision ou en streaming européen.
Sur les réseaux, elle est aussi plus stable, car elle évite les saccades visibles que peut provoquer le 24 i/s.
50 i/s : pour un ralenti doux et maîtrisé
Filmer à 50 images/seconde permet de ralentir une action de moitié sur une timeline à 25 i/s tout en gardant une fluidité parfaite.
C’est une cadence idéale pour magnifier un geste, un déplacement, ou donner de la grâce à une scène du quotidien.
Elle sert souvent à créer une atmosphère poétique ou contemplative, sans tomber dans le ralenti excessif.
Mais elle doit rester un choix artistique, pas une habitude : filmer un dialogue à 50 i/s détruit la texture cinématique et donne un rendu trop “vidéo”.
100 i/s : le super-ralenti et les actions rapides
Au-delà de 100 i/s, on entre dans le domaine du super slow motion.
Cette cadence est réservée aux mouvements très rapides : éclaboussures, sports, flammes, chutes d’objets, etc.
Elle fige le détail invisible à l’œil nu et rend les scènes spectaculaires.
Mais elle a un coût :
- chute de luminosité (il faut beaucoup plus de lumière)
- fichiers lourds
- souvent un recadrage (crop)
- parfois une baisse de qualité d’image selon les caméras.
C’est une cadence à employer ponctuellement, jamais comme standard de tournage.
Pourquoi ne pas tout filmer à 50 ou 100 i/s
La tentation est logique : filmer en haute fréquence pour tout ralentir ensuite.
Mais cette idée crée de vrais problèmes techniques :
- Perte de qualité : beaucoup de caméras réduisent la résolution ou la plage dynamique en haute cadence.
- Audio inutilisable : filmer à plus de 25 i/s rend impossible la synchronisation labiale en tournage son direct.
- Poids des fichiers : plus d’images = plus de données à stocker et à traiter.
- Sous-exposition : la vitesse d’obturation double avec la fréquence, laissant moins de lumière au capteur.
Résultat : la haute cadence ne doit servir qu’à l’effet de ralenti, pas aux scènes de narration ou de dialogue.
Fréquence d’image ≠ Vitesse d’obturation
Ces deux notions sont souvent confondues :
- La fréquence d’image (FPS) correspond au nombre d’images enregistrées par seconde.
- La vitesse d’obturation (shutter speed) indique combien de temps chaque image est exposée à la lumière.
En vidéo, la règle classique est simple :
vitesse d’obturation ≈ deux fois la fréquence d’image.
Exemple : 1/50 s pour 25 i/s.
Ce rapport maintient un flou de mouvement naturel.
Modifier ce ratio peut être intéressant artistiquement (par exemple un obturateur rapide pour un effet nerveux ou un obturateur lent pour un effet onirique), mais cela doit rester un choix maîtrisé
Conclusion
Filmer à 24 ou 25 i/s, c’est préserver la respiration du mouvement et l’émotion du réel.
Utiliser le 50 ou le 100 i/s, c’est une décision artistique pour magnifier un instant précis, pas un réglage par défaut.
Un cadreur ou un vidéaste conscient de ces différences choisit sa cadence selon l’intention du plan, pas selon la mode.
La technique devient alors un langage : chaque fréquence d’image raconte une autre façon de voir le temps.
Et petite astuce pour terminer:
Exercice : filmer la même action à quatre cadences (24, 25, 50, 100 i/s) sur trépied, en gardant le même cadre et la même lumière.
Changer uniquement la vitesse d’obturation à chaque prise.
Comparer ensuite la luminosité : plus la cadence monte, plus il faut de lumière.
Importer les plans dans une timeline à 24 i/s pour observer le rendu réel.
Le 24 i/s garde le flou naturel du cinéma, le 25i/s adoucit légèrement, le 50 i/s offre un ralenti fluide, le 100 i/s un effet très stylisé.
Vérifier aussi la taille des fichiers et la résolution selon les modes.
Analyser les différences de texture, de fluidité et de réalisme.
Noter comment la cadence influence la perception du mouvement et l’émotion visuelle.
Cet exercice apprend à choisir la bonne fréquence selon l’intention du plan.
Il développe un réflexe de cadreur conscient, pas dépendant des automatismes.
Merci de m'avoir lu
Eddy Creuzet
Je suis Chef opérateur camera fiction, Pub ou Corporate depuis + de 20 ans
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